Analyse du yen : la tempête des taux de change face au dilemme politique

Les autorités japonaises sont actuellement confrontées à une crise d’équilibre délicate en matière de politique. Alors que le taux de change du yen s’approche des 155, la divergence entre la nouvelle gouvernance et la banque centrale en matière d’orientation politique devient de plus en plus évidente, et la confiance du marché dans l’efficacité des interventions s’érode.

La accélération de la baisse du taux de change

Ce trimestre, le yen a déjà perdu environ 4,5 % face au dollar, ce qui le place en tête des devises du groupe des dix (G10). Mercredi, lors de la séance de trading aux États-Unis, le yen a brièvement atteint un niveau critique de 155,04 yen pour 1 dollar, avant de fluctuer autour de 154,96.

Ce mouvement de baisse se caractérise par sa rapidité. Depuis une brève hausse à 149,38 à la mi-octobre, le yen a connu une volatilité de plus de 5 yen en seulement quelques semaines. La ministre japonaise des Finances, Shōgetsu Katō, a admis que la tendance du marché devenait unilatérale, et que la rapidité des fluctuations suscitait des inquiétudes. Elle a indiqué au parlement que le gouvernement surveillait de près toute volatilité excessive ou désordonnée du marché avec une grande urgence.

La racine du conflit politique

Le programme d’expansion fiscale promu par la nouvelle gouvernance japonaise crée une situation difficile à concilier avec la dépréciation du yen. La Première ministre, Sanae Takaichi, insiste pour ralentir le rythme de hausse des taux de la banque centrale, tout en augmentant les dépenses publiques, ce qui en soi affaiblirait le yen. Par ailleurs, pour apaiser les inquiétudes du président américain Trump concernant la politique commerciale du Japon, le pays doit également mobiliser d’importantes réserves de devises étrangères pour s’engager dans des investissements aux États-Unis.

Marito Ueda, directeur général de SBI FXTrade Co., souligne que la situation actuelle diffère radicalement du contexte d’intervention de l’année dernière. L’an dernier, le Japon a effectué une intervention avant une hausse des taux de la banque centrale, avec des attentes de marché relativement claires ; aujourd’hui, Sanae Takaichi poursuit une politique d’expansion fiscale, et même si le gouvernement peut, à court terme, empêcher une dépréciation supplémentaire du yen par des interventions, à long terme, le yen restera sous pression.

Les leçons de l’intervention de l’année dernière

Le ministère japonais des Finances est intervenu lorsque le yen a frôlé 160,17 contre le dollar, et a effectué des opérations supplémentaires à plusieurs niveaux de prix, notamment à 157,99, 161,76 et 159,45. Selon les déclarations officielles, l’accent était mis sur l’amplitude et la rapidité des fluctuations du taux de change, plutôt que sur des niveaux précis.

Concernant ce qu’on entend par « fluctuations excessives », il n’existe pas de formule rigide, mais un responsable clé l’an dernier a défini : si le yen fluctue de 10 yen en un mois, cela constitue une variation rapide ; si la fourchette de variation atteint 4 % en deux semaines, cela s’écarte des fondamentaux. Selon ces critères, la fréquence de volatilité actuelle du yen est déjà dans une zone sensible.

L’incertitude sur l’efficacité des interventions

Jane Foley, responsable de la stratégie des devises chez ABN AMRO, rappelle que si l’intervention n’est pas perçue comme capable d’empêcher le franchissement du seuil psychologique de 155, la crédibilité des futures interventions sera mise à l’épreuve, augmentant ainsi le risque de volatilité du marché.

Les experts estiment généralement qu’une intervention seule, sans hausse des taux, aura des effets limités. Yujiro Goto, stratège en devises chez Nomura Securities, analyse qu’une fois que le dollar atteindra 155 yen, le risque d’intervention orale par les autorités japonaises augmentera, et la probabilité d’une hausse des taux de la Banque du Japon en décembre aussi. Il prévoit qu’en achetant des yen et en augmentant les taux, le yen pourrait se renforcer jusqu’à environ 150 ou même davantage.

La Banque du Japon annoncera sa prochaine décision de politique monétaire le 19 décembre. Le mois dernier, le conseil des gouverneurs a décidé, par un vote de 7 contre 2, de maintenir les taux inchangés, mais une enquête de Bloomberg montre que la majorité des économistes prévoient une hausse des taux en janvier prochain.

La subtile évolution de l’attitude américaine

Le secrétaire au Trésor américain, Bessent, a récemment appelé la nouvelle gouvernance japonaise à donner à la banque centrale plus d’autonomie pour faire face à l’inflation et à la volatilité excessive du taux de change — ce qui indique sans doute une tendance de Washington à préférer une hausse des taux par la banque centrale japonaise plutôt qu’une intervention directe sur le marché.

Hirofumi Suzuki, stratège en devises à la Sumitomo Mitsui Banking Corporation, indique que si le Japon veut intervenir, il devra probablement obtenir l’accord des États-Unis au préalable, et que la position de Washington semble déjà claire. Cela fait écho aux critiques de Trump concernant la politique de change du Japon visant à obtenir un avantage commercial.

Les doubles effets de la dépréciation du yen

Un yen faible profite aux entreprises exportatrices, en augmentant la valeur de leurs profits convertis en devises étrangères ; mais il augmente aussi le coût des importations, accentuant la pression inflationniste intérieure. Si aucune mesure n’est prise pour freiner cette tendance à la dépréciation, cela pourrait entraîner de nouvelles critiques américaines, tout en renforçant la tendance baissière du marché, créant un cercle vicieux.

Actuellement, le défi pour le Japon est le suivant : l’expansion fiscale affaiblit le yen, la banque centrale est limitée dans sa capacité à augmenter les taux ; les États-Unis soutiennent la hausse des taux mais s’opposent à l’intervention ; la confiance du marché dans la politique vacille. Le résultat de cette partie d’échecs politiques déterminera directement la future trajectoire du yen et mettra à l’épreuve la capacité de la nouvelle gouvernance japonaise à mettre en œuvre ses politiques.

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